Dialogue Multi acteurs sur l’agriculture urbaine et la reforestation de la Ceinture Verte

Dialogue Multi acteurs sur l’agriculture urbaine et la reforestation de la Ceinture Verte

21/06/2024

Les écosystèmes de la planète terre sont menacés et les modes de production et de consommation non – durables en sont les principales causes. Le monde se trouve dans une situation d'urgence climatique. Si les émissions de gaz à effet de serre ne diminuent pas de façon spectaculaire, le réchauffement pourrait dépasser les 2,9 °C au cours de ce siècle. Signale l’UNEP .

Les villes contribuent significativement, au réchauffement climatique car elles représentent 70 pourcent des émissions de CO2.
La FAO prévoit que d'ici à 2050, 68 pour cent de la population mondiale sera urbaine et 70 pour cent de la nourriture sera consommée dans les villes.

À l’instar des villes de l’Ouest de l’Afrique, dans la capitale du Burkina, Ouagadougou, les températures sont sur une tendance à la hausse depuis plus de dix ans ; ajouté à cela, la dégradation de la nature du fait de l’Homme, rendent la vie dans la capitale de plus en plus rude, surtout pour les plus pauvres. La flore originale de la ville de Ouagadougou se réduit, en variété et en quantité.

Aujourd'hui, à Ouagadougou, l’urbanisation accélérée de la ville accroit la pression foncière. Les espaces dédiés à l’agriculture urbaine et péri-urbaines se raréfient. “ les questions de production se posent toujours avec acuité." informe Assami TIENDREBEOGO, premier vice-président de la Délégation spéciale de la Commune de Ouagadougou. Il est essentiel de veiller à ce que les populations urbaines reçoivent une alimentation saine et sûre tout en respectant l'équilibre naturel des écosystèmes.

La Municipalité a ainsi adhéré, en 2018, au Pacte de Milan , et en 2022, à la Déclaration de Glasgow sur l’alimentation et le climat . Le Pacte de Milan, lancé en 2015, en son point premier, engage les signataires à développer des systèmes alimentaires durables qui préservent la biodiversité et atténuent les effets du changement climatique tout en s’y adaptant. Le point 15 de la Déclaration de Glasgow engage les autorités municipales à réduire les émissions de gaz à effet de serre des systèmes alimentaires urbains et régionaux, à la mise en place de systèmes alimentaires durables à mesure de reconstruire des écosystèmes tout en offrant une alimentation sûre saine durable et accessibles à tous les habitants de la ville et au-delà.

Les autorités Municipales de la ville de Ouagadougou marquent ainsi leur forte volonté de s'engager dans une démarche « alimentation durable et saine » et d'en faire la promotion sur leur territoire. La commune de Ouagadougou l'expérimente sur la ceinture verte, un espace destiné à protéger contre les vents d’harmattan, l’ensoleillement, une ville connue pour ses hautes à très hautes températures. Elle mène sur cet espace, qui doit servir de rempart vert, des activités d’agroforesterie et de production maraîchère.

Il faut des pratiques agroécologiques pour récupérer nos terres, l’environnement et même les humains. Il faut pratiquer l’agroécologie pour essayer de sauver tout ce qui est vie.

Souleymane BELEMGNEGRE Président de l’Association Beo – Neere Agroécologie

Le défi de réussir le reverdissement de la ceinture verte

Les autorités Municipales mènent des actions en vue de sauvegarder la flore de la ville tout en contribuant à l’alimentation saine de ses habitants.

La ceinture verte a été délimitée en 1976 pour enrayer l'érosion causée par les phénomènes naturels, à protéger les ressources en eau contre l’envasement et l’ensablement et pour fournir de l'énergie - la biomasse, principale source d'énergie utilisée dans la ville à cette époque - et de la nourriture pour les ménages de la ville. Au fil des années, cet espace, créé dans l’optique de devenir un poumon vert a été occupé pour des activités sans liens avec l’oxygénation.

Ces dernières années , des initiatives ont été développées en vue de son reverdissement. La Mairie de la ville après une série de reboisement, a installé sur l’espace, des femmes initialement collectrices d’agrégats, pour prendre soin des arbres. En contrepartie, la Municipalité et ses partenaires ont aménagés des parcelles afin qu’elles y produisent des légumes destinés à l’approvisionnement des marchés domestiques. Sur cette zone de plus de 1 100 ha, 40 ha ont déjà été aménagés pour l'agroforesterie 4750 arbres y ont été plantés ; l’aménagement de 230 ha pour le reboisement et le maraichage se poursuit.

Cependant, l’arrosage des arbres et la production maraîchère sur cet espace vert, ne se font pas sans difficultés.

Malgré les forages fonctionnels, le débit de l'eau reste faible pour une production intense

, s’exprime Mme Sophie SEDOGO née HEMA au nom des femmes, membres de son Association la Saisonnière, elle est la présidente de l’association dont des membres cultivent sur la Ceinture Verte. À cette difficulté s'ajoutent l’occupation d'une partie importante des terres par des personnes qui exercent des activités incompatibles avec la production durable, sans parler de la pollution générée par les ordures ménagères déversées sur une partie de la ceinture verte.

les questions de production se posent toujours avec acuité

Assami TIENDREBEOGO premier vice-président de la Délégation spéciale de la Commune de Ouagadougou

L'approche de Rikolto

Rikolto accompagne la Municipalité dans le projet de revalorisation de la ceinture verte.

Dans cette dynamique, et en collaboration avec certains de ses partenaires de mise en œuvre que sont l’Association Beo Neeré Agro – écologie et la Saisonnière, Rikolto mène des actions de renforcement des capacités des membres de la fédération des pépiniéristes et maraichers du Burkina sur les pratiques agroécologiques et l’agroforesterie.

En outre, Rikolto veut accompagner la Municipalité à mieux coordonner les investissements des différents acteurs, qui viennent la soutenir dans la restauration de la ceinture verte, avec des approches et démarches diverses.

“Notre objectif est de soutenir la Municipalité dans son action de reverdissement de la ville et de faire de la ceinture verte une zone d’approvisionnement en légumes pour la ville. Nous travaillons ainsi à développer avec eux, un modèle économique d’aménagement paysager rentable pour les producteurs qui contribuent au reverdissement de la ville et à son approvisionnement en légumes. Concernant le reverdissement, il s’agit pour Rikolto d’accompagner la ville à intégrer dans le choix des espèces à planter, des essences utilitaires et ou en voie de disparition. Quant aux producteurs maraichers installés sur la ceinture verte, notre ambition est de les soutenir dans la transition vers l’agroécologie et l’accès à des marchés plus rémunérateurs »

Bernadette OUATTARA, Directrice Régionale du Programme Good for Cities pour Rikolto en Afrique de l'Ouest

Le lancement d'un dialogue multi-acteurs

Rikolto, convaincu que les problèmes des systèmes alimentaires durables peuvent trouver des solutions par une action collective des parties prenantes, propose le processus multi-acteurs pour résoudre les difficultés liées à l'agriculture urbaine et particulièrement à la gestion de la ceinture verte de Ouagadougou. Le processus multi- acteurs (MSP)) est «

un processus d'apprentissage interactif, d'autonomisation et de gouvernance participative qui permet aux parties prenantes ayant des problèmes et des ambitions interconnectés, mais des intérêts souvent divergents, d'être collectivement innovantes et résilientes face aux risques, aux crises et aux opportunités émergentes dans un environnement complexe et changeant»

, tel est-il défini dans la boîte à outils du MSP de Rikolto.

Rikolto a ainsi initié en collaboration avec la Municipalité, un processus multi acteurs pour une meilleure coordination des actions d’aménagement et de soutien aux producteurs de la ceinture verte. Dans la première quinzaine de décembre 2023, du 13 au 14 décembre 2023, la commune de Ouagadougou, avec l'appui de Rikolto, a lancé un dialogue multi-acteurs avec près de soixante-dix représentants de quarante-trois structures opérant sur la ceinture verte de Ouagadougou.

Un résultat majeur obtenu grâce au dialogue

Au cours des deux jours de travaux, le dialogue multi-acteurs a permis aux participants de formuler une vision pour la ceinture verte :

À l’horizon 2040, la ceinture verte est un pôle agroécologique de référence bien aménagé conformément à sa vocation, source de production durable d’aliments sains, nutritifs et d’espèces locales en voie de disparition, à même de contribuer à la souveraineté alimentaire ; un site pourvoyeur d’emplois verts pour les femmes, jeunes et autres couches vulnérables dans la commune de Ouagadougou

Ce résultat majeur du dialogue multi-acteurs a été présenté par les autorités Municipales de Ouagadougou aux décideurs nationaux qui en ont tenu compte dans la formulation de la Vision globale et stratégique pour la Ceinture Verte de Ouagadougou.

“Nous allons valoriser les résultats des réflexions de cet atelier, pour planifier une feuille de route de l’action à mener dans l’optique d’accompagner la Municipalité dans son action ». Explique Bernadette OUATTARA, Directrice Régionale du Programme Good for Cities pour Rikolto en Afrique de l'Ouest.

L’ensemble des acteurs attendent cette feuille de route pour améliorer leurs collaborations et leurs impacts sur la ceinture verte de Ouagadougou.

« C’est aujourd’hui ou jamais qu’il faut engager les réformes, les mesures nécessaires pour assurer la durabilité de notre territoire. Parce que la durabilité du territoire dépend de notre sécurité alimentaire ».

Valentin BAYIRI Chef de Département prospective et Planification de la Mairie de Ouagadougou.